Marcel Gauchet / Folio Gallimard / 8.20€
Pourquoi vivons-nous cette crise, que tous les pays traversent, comme un mal incomparable, qui nous situe en tête des pays les plus pessimistes ?Marcel Gauchet commence par un rappel historique, qu’il fait démarrer au XVIIème siècle (de manière révélatrice « le grand siècle » pour les Français), et sur l’idée que les Français maintenant se font d’eux-mêmes et du monde.
Il étudie plus en profondeur les mandats de De Gaulle et Mitterrand qui seront les matrices du mal être contemporain. Les Français se vivent comme déclassés par rapport aux autres, car les choix historiques profonds qu’ils ont faits se sont avérés obsolètes. Leur vision de la grandeur était politique et leur culture élitiste, le monde moderne est managérial et la culture est de masse.Le malaise grandit quand les élites françaises décident de changer le pays, mais sans le dire. A partir de 1983, le discours anti-libéral continue, la crise est niée ou minimisée, mais on fait tout autre chose, puis on court derrière l’Europe pour en faire le lieu de notre grandeur en se contentant d’imiter ce que désormais on considère comme l’horizon indépassable du monde, pour simplifier, le capitalisme financier.
Désormais, de Mitterrand à Hollande, diriger c’est dissimuler.Le mépris des élites françaises intellectuelles ou managériales mondialisées est au cœur de cette problématique pour le petit peuple de France, toujours « bloqué » ou « archaïque ». La manière dont les dirigeants ont contourné les « non » au référendum sur l’Europe, laissé appliquer la directive « Bolkenstein » (dite du plombier polonais),alors que 80% des Français était contre, est significative. Peut-être fallait-il prendre ces décisions, mais on est en démocratie ou on ne l’est pas ! Comme tous les livres de Marcel Gauchet le livre est passionnant et porte loin la réflexion.
Jean-Marc